2017 10 10 jonas le tetu
PAPE FRANÇOIS
MÉDITATION MATINALE EN LA CHAPELLE DE LA
MAISON SAINTE-MARTHE
Jonas le têtu
Mardi 10 octobre 2017
(L’Osservatore Romano, Édition hebdomadaire n° 043 du 26 octobre 2017)
L’homme a du mal à entrer dans la logique de Dieu et applique souvent un concept de « justice » qui souffre de sa « rigidité» et de son « entêtement ». Limité comme il est au petit horizon de son cœur, il ne réussit pas à comprendre comment «œuvre le Seigneur », son infinie miséricorde et volonté de pardon. C’est ce qu’explique l’histoire du prophète Jonas, que le Pape François a pris comme point de départ de sa réflexion. Il a reparcouru le livre de Jonas en faisant auparavant remarquer qu’il ressemble à « un dialogue entre la miséricorde, la pénitence, la prophétie et l’entêtement ». « Quand le Seigneur l’envoya prêcher la conversion dans la ville de Ninive », il s’en alla « avec un bateau dans la direction opposée ». C’est-à-dire qu’il « fuyait la mission que Dieu lui avait confiée et remise entre les mains ». La deuxième partie de l’histoire est racontée précisément dans la première lecture du mardi (Jon 3, 1-10): « En ces jours fut adressée à Jonas, une deuxième fois, cette parole du Seigneur : “Lève-toi, va à Ninive et annonce-leur ce que je t’ai dit”». Cette fois, le prophète « obéit ». « Dieu vit leurs œuvres, c’est-à-dire qu’ils s’étaient convertis de leur mauvaise conduite, et Dieu changea d’avis à propos du mal qu’il avait menacé de leur faire, et ne le fit pas ». « Dieu ne pouvait pas entrer dans leur vie parce qu’elle était enfermée dans ses vices, ses péchés »; puis, ceux-ci, « avec la pénitence, ont ouvert leur cœur, ont ouvert leur vie et le Seigneur a pu rentrer ». « Dans le troisième passage, Jonas se mit en colère, parce que le Seigneur avait pardonné la ville : “Non, tu m’as envoyé, j’ai prêché. A présent, tu dois faire ce que tu avais dit”». Ici apparaît le fait que Jonas «était têtu, mais plus que têtu, il était rigide ; il était malade » de « rigidité de l’âme ». « Il avait l’âme “amidonnée”, elle ne pouvait pas s’étendre, elle était fermée : les choses sont ainsi et doivent être ainsi ». C’est pourquoi, après « la conversion de Ninive », le Seigneur a eu « un autre travail » à faire : la « conversion de Jonas ». C’est ainsi que l’Ecriture parle aussi à l’homme d’aujourd’hui : « Ceux qui ont l’âme têtue, les rigides, ne comprennent pas ce qu’est la miséricorde de Dieu. Ils sont comme Jonas : “Nous devons prêcher cela, que ceux-ci soient punis parce qu’ils ont fait du mal et doivent aller en enfer”». C’est-à-dire que les rigides « ne savent pas élargir leur cœur comme le Seigneur. Les rigides sont pusillanimes, avec leur petit cœur fermé, attachés à la justice nue ». Surtout, a-t-il ajouté, les rigides « oublient que la justice de Dieu s’est faite chair dans son Fils, s’est faite miséricorde, s’est faite pardon ; que le cœur de Dieu est toujours ouvert au pardon. De plus, ils oublient que Dieu, sa toute-puissance, se manifeste surtout dans la miséricorde et dans le pardon ». Pour l’homme, « il n’est pas facile de comprendre la miséricorde de Dieu, cela n’est pas facile ». Il « faut beaucoup de prière pour la comprendre parce que c’est une grâce ». En effet, les hommes sont habitués à la logique du « tu m’as fait ceci, je te ferai la même chose », à la justice du « tu as fait cela, maintenant tu dois payer ». Au contraire, « Jésus a payé pour nous et continue de payer ». « Dieu est allé parler à Jonas, pour le convaincre ». Parce que c’est « le Dieu de la patience, c’est le Dieu qui sait caresser, qui sait élargir les cœurs ». Voilà donc « le message de ce livre prophétique »: avec son « dialogue entre la prophétie, la pénitence, la miséricorde et la pusillanimité ou l’entêtement », il nous dit que « la miséricorde de Dieu l’emporte toujours ».