2017 10 19 pharisiens aujourdhui
PAPE FRANÇOIS
MÉDITATION MATINALE EN LA CHAPELLE DE LA
MAISON SAINTE-MARTHE
Pharisiens d’aujourd’hui
Jeudi 19 octobre 2017
(L’Osservatore Romano, Édition hebdomadaire n° 044 du 3 novembre 2017)
On ne peut jamais fermer la porte devant des parents qui demandent le baptême pour leur enfant, même s’ils ne sont pas mariés à l’église : le chrétien, et surtout le pasteur, ne devrait jamais oublier la gratuité du salut, la proximité de Dieu et le caractère concret des œuvres de miséricorde, matérielles ou spirituelles. Telle est l’invitation forte à toujours ouvrir les portes aux autres, et également à soi-même, suggérée par le Pape François qui a commenté le passage de l’Evangile de Luc (11, 47-54). « Il appartient au style de l’évangéliste », qui est propre « aussi bien à Luc qu’à Matthieu ». En réalité, « ce verset est un peu obscur : que signifie “emporter la clé de la connaissance”, avec la conséquence de ne pas entrer dans le Royaume et de ne pas même laisser entrer les autres ?». Ainsi, « ce fait d’emporter la capacité de comprendre la révélation de Dieu, de comprendre le cœur de Dieu, de comprendre le salut de Dieu — la clé de la connaissance —, nous pouvons dire qu’il s’agit d’un grave oubli ». Car « on oublie la gratuité du salut, on oublie la proximité de Dieu et on oublie la miséricorde de Dieu ». « On ne peut pas comprendre l’Evangile sans ces trois choses ». Donc, « ils ont oublié la gratuité». Et Paul parle de cela dans la première lecture (Rm 3, 21-30). « Ils ont perdu la clé de l’intelligence qui est la gratuité du salut ». En réalité, « la loi est une réponse à l’amour gratuit de Dieu : c’est Lui qui a pris l’initiative de nous sauver et, parce que tu m’as tant aimé, je cherche à suivre ta route, celle que tu m’as indiquée », en un mot « j’accomplis la loi ». Et ces personnes « ont perdu la clé de l’intelligence, parce qu’elles ont perdu le sens de la proximité de Dieu : pour elles, Dieu est celui qui a fait la loi », mais « celui-là n’est pas le Dieu de la révélation ». En réalité, « le Dieu de la révélation est Dieu qui a commencé à marcher avec nous d’Abraham jusqu’à Jésus Christ : Dieu qui marche avec son peuple ». C’est pourquoi, « quand on perd cette relation de proximité avec le Seigneur, on tombe dans cette mentalité obtuse qui croit dans l’autosuffisance du salut par l’accomplissement de la loi ». Voilà, alors, « la proximité de Dieu ». Mais quand la prière manque, on ne peut pas enseigner la doctrine, ni faire de la théologie, pas même de la théologie morale », que « l’on fait à genoux, toujours près de Dieu : ces gens avaient perdu ce sens de la proximité, ils avaient oublié la proximité de Dieu ». En outre, en agissant ainsi, ces personnes ont également « perdu la mémoire de la miséricorde de Dieu ». En effet, « dans la parole de Dieu, le Seigneur répète souvent “je veux la miséricorde, pas des sacrifices”». « Les œuvres de miséricorde sont la pierre de comparaison de l’accomplissement de la loi », car elles nous permettent de « toucher la chair du Christ, de toucher le Christ qui souffre dans une personne, aussi bien corporellement que spirituellement ». François a donc présenté « ces trois oublis », qui « sont la racine. Ainsi, s’éloigner du salut est également à la racine du fait « d’emporter la clé de la connaissance : on ne connaît pas le salut de cette manière ». D’où l’exhortation à s’interroger : « Quelles sont les conséquences ?». « Le passage évangélique d’aujourd’hui en signale deux », a précisément été la réponse. « Tout d’abord la fermeture : « Je me rappelle du fait que, dans mon pays, j’ai entendu de nombreuses fois que des curés ne baptisaient pas les enfants des filles-mères, parce qu’ils n’étaient pas nés dans un mariage canonique : ils fermaient la porte ». Plus encore : il y a trois mois, dans une ville, une mère voulait faire baptiser son enfant qui venait de naître, mais elle était mariée civilement avec un divorcé. Le curé a dit : “oui, oui, je baptise l’enfant, mais ton mari est divorcé, qu’il reste dehors, il ne peut pas être présent à la cérémonie”». Et « cela arrive aujourd’hui », car « les pharisiens, les docteurs de la loi ne sont pas des choses de cette époque-là: aujourd’hui aussi, il y en a beaucoup ». « Et la deuxième conséquence : quand on perd la clé de la connaissance, que ce soit dans la gratuité du salut, dans la proximité de Dieu ou dans les œuvres de miséricorde, on arrive à la corruption ». Demandons « au Seigneur la grâce de la mémoire de notre salut, de la gratuité du salut, de la proximité de Dieu — et que cela nous fasse prier — et du caractère concret des œuvres de miséricorde que le Seigneur veut de nous, qu’elles soient matérielles ou spirituelles, mais concrètes ».